L’entreprise d’isolement de Nouvelle Alliance menée par différentes composantes du mouvement antifasciste québécois a fini par porter ses fruits. D’abord avec les événements entourant leur rassemblement avorté du 19 mai, où l’organisation nationaliste identitaire a montré ses vraies couleurs en agressant physiquement des militant·es antifascistes, puis, plus récemment avec leur tentative d’organiser une large manifestation pour l’indépendance, à Québec le 20 septembre dernier. Cette initiative a attiré des centaines d’indépendantistes… qui se sont retourné·es contre les membres et sympathisant·es de  Nouvelle Alliance, les ont isolé·es et empêché·es de marcher.

Ces évènements leur ont aliéné la plupart des forces indépendantistes qui comptent aujourd’hui, du Mouvement des étudiants et étudiantes indépendantistes (MEI) aux OUI-Québec, en passant par la très centriste et consensuelle Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal. Même la porte du Parti Québécois, longtemps restée entr’ouverte, est en train de se refermer sur leurs doigts. Plus l’organisation d’extrême droite se dévoile (ou est dévoilée) et plus le cordon sanitaire autour d’elle se solidifie. Nous considérons qu’il s’agit d’une excellente nouvelle.

Cela étant dit, cette fermeture sur leur champ gauche amène la jeune organisation à aller chercher de l’écho sur son champ droit. Nous considérons que Nouvelle Alliance vient de franchir à cet égard une autre frontière symbolique. Une frontière sombre, bien sombre.

En organisant ses « Perspectives nationalistes » le 4 octobre prochain à Trois-Rivières, avec comme invité d’honneur François Dumas du Cercle Jeune Nation, Nouvelle Alliance ouvre littéralement la porte au fascisme. Ne vous y trompez pas, il ne s’agit pas d’une simple conférence, mais bien d’une formation politique quasi obligatoire pour les membres de Nouvelle Alliance.

Le Cercle Jeune Nation (CJN), c’est quoi?

Jeune Nation, qui deviendra plus tard le Cercle Jeune Nation, est fondée au milieu des années 1980 par deux étudiants de l’Université de Montréal : François Dumas et Rock Tousignant. Jeune Nation s’inspirait en fait de deux organisations françaises, elles-mêmes liées par leur histoire et leur filiation avec le nazisme et le fascisme : Jeune Nation, active dans les années 1940 et 1950; et Ordre Nouveau, qui rassembla en son sein plusieurs chapelles de l’extrême droite radicale à la fin des années 1960 et donnera naissance au tristement célèbre Front national. Jeune Nation — la version québécoise — s’inspire ainsi du mouvement néofasciste français dit « nationaliste révolutionnaire » et en particulier de son maître à penser, François Duprat.

S’ajoute aux préoccupations centrales du CJN une vénération pour l’Abbé Lionel Groulx ainsi qu’une farouche opposition à l’immigration (non blanche), qui diluerait à la fois la « race » canadienne-française et le « fait français » au Québec.

Pragmatiquement, le Cercle Jeune Nation s’inspire aussi directement du Groupement de recherche et d’études pour la civilisation européenne (GRECE), le vaisseau amiral de la « nouvelle droite » française, dont l’objectif tacite a toujours été de réhabiliter le fascisme par des moyens « métapolitiques » (culturels, intellectuels, etc.).

Un extrait du texte « Quelques jalons pour l'histoire d'une organisation nationaliste de droite au Québec », par François Dumas, dans le no. 2 des <em>Cahiers de Jeunes Nation</em> (juillet 1992). Dumas dévoile ici sa stratégie de ne pas se dire explicitement d'extrême droite publiquement,  tout en assumant l'être en privé. Une stratégie reprise en tout point par Nouvelle Alliance.

Un extrait du texte « Quelques jalons pour l’histoire d’une organisation nationaliste de droite au Québec », par François Dumas, dans le no. 2 des Cahiers de Jeunes Nation (juillet 1992). Dumas dévoile ici sa stratégie de ne pas se dire explicitement d’extrême droite publiquement,  tout en assumant l’être en privé. Une stratégie reprise en tout point par Nouvelle Alliance.

Le Cercle Jeune Nation préconisait une philosophie « pas d’ennemis à droite », ce qui les amenait à accepter tous les nationalistes de droite et d’extrême droite sous leur chapiteau. C’est une approche qui a également caractérisé la Fédération des Québécois de souche (FQS, fondée par des néonazis, faut-il le rappeler) et son journal, Le Harfang, auquel collabore d’ailleurs encore aujourd’hui Roch Tousignant, cofondateur du CJN. Cette collaboration se reflète à ce jour dans le canal Telegram du Harfang, où le contenu du blogue CJN est systématiquement reproduit…

À l’origine, Nouvelle Alliance se concevait comme un véhicule pour tous les indépendantistes et se définissait comme ni-de-droite-ni-de-gauche. On constate que cette ambition est désormais laissée de côté, faute d’un réel appui à gauche. NA est aujourd’hui un front uni de l’extrême droite québécoise, d’Alexandre Cormier-Denis au Cercle Jeune Nation, en passant par les boneheads suprémacistes blancs comme David Leblanc et les catho-laïques qui manifestent contre les prières de rues musulmanes. Ça ressemble  beaucoup au principe de pas d’ennemis à droite…

Nous savons que plusieurs membres de Nouvelle Alliance de la première heure ont quitté le bateau dans les derniers mois en raison de l’extrême-droitisation de son leadership. Aux membres encore présents : il devient de moins en moins possible de dire que vous ne saviez pas…

///

 

Serait-ce le même François Dumas, outremontais,, qui faisait l'objet en 1972 de cette brève dans le bulletin Serviam du Parti de l'unité nationale du Canada (PUNC), la formation héritère du néonazi Adrien Arcand?

Serait-ce le même François Dumas, outremontais, qui faisait l’objet en 1972 de cette brève dans le bulletin Serviam du Parti de l’unité nationale du Canada (PUNC), la formation héritère du « nazi canadien » Adrien Arcand?